Dans ce nouveau cycle, j'aborde plusieurs notions centrales dans la pratique du yoga qui sont peu approfondies dans le cadre des cours collectifs. Avez-vous déjà entendu un des mots suivants : drishtis, bandhas, mudras, mantras, chakras, ujjayi ? C'est probable. Savez-vous ce qu'ils recouvrent ? C'est moins probable. Si elles sont abordées durant un cours, ces notions n'en sont pour autant que rarement approfondies (ce qui peut se comprendre, le cœur d'un cours collectif étant de vous guider dans la dimension physique de votre pratique - placement, alignement, engagement, etc.). Après les drishtis la semaine dernière, on continue aujourd'hui avec les bandhas. Vous savez que j'aime partir de l'étymologie pour mieux cerner un concept. Ici, bandha, en sanskrit, signifie "verrou". Dans la tradition de l'ashtanga vinyasa yoga, cette notion est à entendre en terme de verrou musculaire.

Il existe 3 bandhas : (i) mula bandha, (ii) uddiyana bandha (iii) jalandhara bandha. Vous pouvez voir à quelles zones musculaires ils sont rattachés sur l'image à gauche. Un 4ème existe, Mala bandha, qui est la combinaison des 3 précédents, aussi appelé "le grand bandha".
(i) Mula bandha se situe à la base de la colonne vertébrale et repose sur la contraction des muscles pelviens. Il "bloque" l'énergie par le bas. (iii) Jalandhara bandha s'appuie sur une contraction au niveau de la gorge et "bloque" l'énergie par le haut. (ii) Uddiyana bandha s'active via les muscles dans la région abdominale/diaphragme et permet de contenir l'énergie qui est canalisée à l'intérieur. (Si vous souhaitez creuser l'aspect physique et musculaire, je vous renvoie vers cet article). Ok vous vous dites mais... à quoi ça sert ? C'est une très bonne question et j'y viens. Pour comprendre l'essence des bandhas, il faut revenir à l'intention originelle du yoga : développer la connaissance de soi. Pourquoi cela ? (je sais, avec le jeu des "pourquoi", on peut remonter très loin et c'est exactement comme ça que je me retrouve à lire sur les philosophies indiennes orthodoxes...). Dans la Bhagavad gita (ouvrage pilier de la pilosophie du yoga), notre âme individuelle est vue comme un temple dôté de 9 portes que sont nos 2 yeux, nos 2 oreilles, nos 2 narines, notre bouche (1) et nos 2 organes génitaux. C'est à travers ces 9 portes que notre énergie (prana) se disperse sans cesse. Autrement dit, nous sommes constamment en prise aux stimulis que nous soumettent nos 5 sens et, de façon générale, nous sommes extrêmement touché.es par les influences extérieures ("oh une odeur de frite", "oh le regard qu'elle m'a lancé", "oh la belle paire de chaussures, "oh le petit vent froid", etc etc etc). Le yoga est, à l'origine, une pratique visant à conserver et canaliser son énergie à l'intérieur de soi. Les bandhas permettent de maximiser les effets de cette pratique car ils sont considérés comme étant rattachés aux chakras et aux nadis (ne paniquez pas et voyez ces 2 éléments comme des sortes de canaux énergétiques). DONC, en activant les bandhas, on touche aux canaux énergétiques, ainsi les bandhas sont considérés comme une sorte de passerelle, d'intermédiaire entre le corps physique et le corps "subtil" (où se trouve notre énergie). Je la refais en plus courte ? On se disperse en permanence --> la pratique du yoga nous aide à nous recentrer --> on apprend à conserver son énergie à l'intérieur de soi --> les bandhas nous aident pour canaliser cette énergie qui est à l'intérieur de nous. --> Jackpot. Cocotiers. Milkshakes à la vanille. Dans la tradition de l'ashtanga vinyasa yoga, l'échelle pour grimper jusqu'aux bandhas serait la suivante : en premier lieu, purification du corps (panchakarma, kriyas) et du mental (yamas, niyamas)(nous avons parlé de ces deux derniers dans la toute 1ère newsletter)(*émotion*). Ensuite, préparation du corps avec la pratique des asanas (postures) puis, intégration des pranayamas (exercices de respiration). Enfin, on passe aux bandhas. La pratique des bandhas est considérée comme avancée et elle se met en place au sein d'une pratique qui est déjà régulière, notamment car on active les bandhas en coordination avec le souffle (maitrise de la respiration) et qu'ils nécessitent de recruter de façon très fine des zones musculaires spécifiques (bonne connaissance et maitrise de son corps). Ici, je me suis attachée à vous dresser un tableau général des bandhas. Il est possible que cela reste très abstrait. Pourtant, souvenez-vous, les bandhas s'appuient sur des engagements musculaires, il est donc possible de les ressentir dans votre corps. Si vous souhaitez en savoir plus sur ce sujet, je vous recommande très très très chaudement la vidéo où Trupta (oui, mon prof indien !) et Stéphanie viu Kessler (la prof française de ma formation) abordent ce sujet. Trupta y guide également 2 exercices pour activer mula bandha.